Interview TV film SS Vic
L'interview a lieu sur le
plateau du film "Welcom to the Hell", décor : salle
à manger-salon de type classe moyenne. SS et Vic sur canapé,journaliste sur fauteuil.
Journaliste face caméra
:
- Bonjour. Nous sommes
donc sur le tournage du dernier film de SS, une comédie grand
public...
La journaliste se tourne
vers SS et Vic. Plan sur les deux femmes.
- Aux côtés
de SS, se tient Vic dont c'est le premier rôle au cinéma.
Suite de gros plans sur
chaque personne à chaque fois qu'elle prenne la parole.
- Tout d'abord, j'aimerai
éclairir votre relation. Je vous ai entendu, Vic, dans les
coulisses, vous avez appelé SS "Auntie", Tata, comme
dans le film.
V : - Exact. D'habitude,
je l'appelle par son prénom. Dans le film, elle joue ma tante
et mon personnage l'appelle comme ça , alors... Je trouve que
ce mot résume bien nos rapports : S, sans doute parce qu'elle
est plus âgée...
S: - Tu peux dire vieille,
ça te brûle les lèvres !
V: - Ok, c'est toi qui
l'as dit ! Donc, sans doute à cause de son grand âge, S.
ne peut s'empêcher de se prendre pour ma mère et elle me
donne des ordres, ce que ma propre mère ne s'est jamais
permis! J'ai pitié de ses efforts pour faire de moi une
personne parfaite... Et comme je l'aime bien, j'utilise ce terme pour
lui montrer mon attachement, mon affection. Mais elle n'est pas ma
mère, elle n'a aucun droit sur moi.
S : - Surtout aucune
autorité. Je suis d'accord avec Vic en ce qui concerne notre
relation, amies est un peu faible et ne correspond pas à ce
qui nous lie. Tante et nièce est plus proche pour définir
nos liens. C'est une relation entre une personne jeune et une autre
plus âgée, c'est vrai. Il y a aussi un rapport de force,
une autorité qui veut s'exercer, pour ma part, je l'avoue,
mais surtout il y a des liens trés forts, trés
puissants entre nous.
J : - C'est vous, SS, qui
avez suggéré Vic pour ce rôle, n'est-ce pas ?
SS : - Oui, le scénario
s'y prétait, un peu trop, ce qui est devenu délicat !
V: - En tout cas, c'est
trés pratique pour moi : ça me permet de ne pas être
trop nulle puisque je suis naturelle. Parce que si on devait compter
sur mes talents d'actrice, le film ne se finirait jamais !!
J : - C'est un film pour
un public large...
Journaliste regarde SS
puis Vic, attendant une réponse.
V : - Tellement large que
le cinéma ne s'en remettra pas !
Journaliste sourit.
J : - Comment ça ?
Vic lève les bras,
mouline.
V : - C'est évident
que ce film obéit à des conventions puritaines !
Elle se calme.
V : - Sérieusement,
en installant les deux héroïnes dans les limites d'une
relation ... familiale, on évite tout l'intérêt
d'une relation plus ambigüe, voire homosexuelle, c'est dommage.
SS regarde Vic les yeux
ronds d'étonnement. Vic se tourne vers elle.
V : - Bin quoi ? Ca nous
aurait changer des amitiés super-viriles ou ces trucs de
filles, où tout est sous-entendu, les mecs ne s'avouent jamais
qu'ils s'aiment sinon, ils sont pas vraiment des hommes, les nanas se
consolent de ces salauds de mecs, et gnagna...
SS : - Oui, bien sûr
mais on aurait tourné un autre film. Et tout le monde nous
aurait pris pour des lesbiennes !
V : - Attends ! Je n'ai
jamais dit que le pas devait être franchi ! Simplement, un peu
plus d'ambiguïté, ça aurait mis du piment dans
l'histoire.
SS hoche la tête. La
journaliste essaie de parler mais Vic l'interrompt.
V : - Et puis être
confondue avec son rôle c'est le dur métier d'actrice,
non ? Au point où tu en es, je ne crois pas que ça
changerait grand'chose à ta réputation...
SS : - Merci beaucoup. Je
crois que tu exagères tout ça.
V : - Pendant que j'y
pense, je me demande comment on aurait pu filmer ça...
SS : - Ne pense pas trop,
tu vas te fatiguer. En plus, on avait dit qu'on ne parlerait pas de
sexe pendant les interviews.
V : - Hé, il faut
bien compenser le peu qu'il y a dans le film.
SS : - Il y a quelques
baisers tout de même.
V : - Pour toi, peut-être,
pour moi, c'est ceinture !
SS : -Tu t'es rattrapée
hors champ.
V : - Trés drôle.
Nempêche, tout le film repose sur notre relation, le conflit
des génrations, le contraste de nos caractères, nos
genres de vie, tout le truc habituel, quoi ? Le non-dit qu'une
relation homosexuelle installe, ça aurait amélioré
la sauce. Tu vois, cette frontière inconsciente entre l'amour
et l'amitié... Aprés tout, ça existe entre un
homme et une femme et il y a des tas de films qui jouent avec ça,
alors pourquoi pas celui-là ?
SS : - Parce que c'est pas
ce genre de film, les limites sont posées, l'histoire est
située dans le comique, et puis il y a une ambiguïté,
dans le passé, on apprend que la mère de ton personnage
a piqué le petit ami de mon personnage, et cet homme c'est le père
de ton personnage...
V: - Tu parles d'une
nouveauté ! Il n'y a rien de trés bizarre ni de trés
nouveau, c'est une rivalité entre soeurs.
SS : - Si tu voulais faire
un film militant, il fallait choisir autre chose.
Vic se tourne vers la
journaliste.
V : - Sinon, c'est un film
trés drôle, vous savez.
J : - Merci de vous
rappeler ma présence.
Sourire de Vic.
V: - Désolée,
je me suis laissée emporter par la discussion.
J : - En tout cas, c'était
une conversation intéressante à écouter. Ce film
n'est pas une grosse machine hollywoodienne. D'ailleurs, SS, vous
avez participée à la production, cela vous change de
vos films précédents...
V : - Enfin un film avec
SS habillée !
SS soupire.
SS : - Je n'ai pas eu le
choix, je voulais justement changer de registre, autant le faire
soi-même. Et puis aucun maison de production n'aurait engagé
Vic, une débutante.
V: - Ouais, un cinéma
à taille humaine, quoi !
J : - Je vous remercie
d'avoir consacré du temps à cette interview.
SS : - Nous vous
remercions de nous avoir supportées.
V : - Et de nous avoir
laissé parler aussi longtemps.
Dernier plan : elles se
serrent la main.