JF
J'ai fait ce portrait en
toute amitié, par défi, par plaisir
et, tout de même, à la demande du sujet. Elle m'a dit, je devais avoir l'air dubitatif :
- Je vous demande peut-être quelque chose de difficile?
- Pourquoi dites-vous ça?
- Parce que je ne suis pas belle en
comparaison des autres femmes
que vous avez peintes.
- Je ne suis pas chargée de répertorier
toutes les beautés du monde. Et puis je
préfère votre plastique à d'autres, plus parfaites mais moins intéressantes.
Vous êtes vivante, vous n'êtes pas seulement une incarnation, une représentation."
Les clichés habituels pour rassurer sans
paraître lèche-cul. Elle s'en rendait compte et
moi aussi.
Son petit nez m'a procuré
énormément de plaisir, la position de son corps, beaucoup de problèmes: si je l'avais peinte au travail, à son bureau,
j'aurais illustré le poncif "pas
belle-mais intelligente". Debout, c'était souligner sa petite taille. Je ne la voyais pas du
tout accroupie ou à genoux. Finalement, en plan américain, cela représente le meilleur compromis.
Je suis particulièrement
fière de son sourire ébauché comme un
enfant guettant un cadeau. Le regard tendu
vers le haut, les yeux brillent, la bouche n'ose exprimer sa joie. Tout le
visage est en attente. On ne voit pas les mains,
ou presque, elles s'ouvrent à peine pour recueillir le cadeau. Les montrer
,c'eut été impoli.
Je ne l'ai pas rendue belle mais je sais qu'elle aime ce portrait. Je me plais à penser qu'il lui a inspiré son jeu dans le film où elle interprète une enfant attardée.